Atlas National

Facteurs morpho-pédologiques

Surnommée, la « Suisse Africaine », la Guinée est un pays au relief accidenté dont l’altitude varie de 0 m au niveau de la mer et culmine à 1752 m au Monts Nimba, au sud du pays, à la frontière avec le Libéria et la Côte d’Ivoire. Au cœur de l’Afrique de l’Ouest, c’est un pays qui fait la synthèse des vastes ensembles très différenciés que l’on retrouve dans cette région (Beaujeu-Garnier, 1958). 

D’un point de vue géomorphologique Boulvert (2003) divise la Guinée en six grands ensembles morphologiques généralement regroupés dans 4 grandes régions naturelles :

      • Les massifs et hauts plateaux du Fouta Djalon correspondant à la Moyenne Guinée ;

      • Les plaines côtière, le plateau Bowé et le plateau gréseux de Kindia-Télimélé formant la Guinée Maritime (ou basse Guinée) ;

      • Les pénéplaines du bassin supérieur du Niger, au Nord-Est du pays, formant la Haute Guinée ;

      • Les massifs granitiques et de gneiss du Sud-Est guinéen formant la Guinée Forestière.

La géologie, la géomorphologie et le climat ont favorisé la formation d’une grande diversité de type de sols, en termes de localisation, composition physico-chimique et structure, leur conférant une grande amplitude d’aptitudes agronomiques. La géomorphologie et les caractéristiques physico-chimiques des sols influencent leur aptitude à accueillir des cultures et les rendements agricoles à attendre. Les fortes pentes limitent souvent les possibilités de mise en cultures annuelles (riz, sorgho, fonio, etc) car ces dernières accélèrent alors l’érosion de la couche superficielle du sol et l’appauvrissent. De la même façon, les bas-fonds inondables sont difficilement cultivables sans un aménagement hydraulique adéquat.

Les caractéristiques des sols telles que leur texture, leur profondeur, leur réserve utile tout comme leur composition chimique, sont autant de facteurs déterminants pour définir leur fertilité intrinsèque ; En Guinée les sols dominants sont les sols ferrallitiques que l’on trouve sur les plateaux et versants de Basse, moyenne et haute Guinée. Ils ont des valeurs agronomiques assez bonnes : ils sont généralement profonds, peu acides. En revanche les sols lithiques sur cuirasse ont une faible valeur agronomique. Les sols de mangrove des plaines littorales ou les sols rajeunis par l’érosion dans les vallées du dominant au sud de la Haute Guinée et en Guinée Forestière, constituent certainement les sols ayant les meilleures valeurs agronomiques du pays.

types de sols
valeur agronomique des sols

Facteurs climatiques de la production agricole

De par sa situation géographique entre 7°30 et 12°30 de latitude Nord, la Guinée est partagée en deux zones climatiques : i) une zone tropicale couvrant la majeure partie du territoire et ii) une zone subéquatoriale au niveau du Sud Est.

Le régime pluviométrique annuel est uni-modal avec une saison pluvieuse de mai à octobre, suivie d’une saison sèche de novembre à avril. C’est un pays très pluvieux avec des moyennes annuelle variant de 1000 mm au nord à plus de 3000 mm sur le littoral, et cumulent partout en juillet et août. Les températures sont élevées. Les moyennes annuelles varient de 19°C sur les sommets au Fouta Djallon et massifs de la Guinée Forestière (Nimba et Béro) et 30°C sur le littoral. L’humidité relative moyenne annuelle de l’air est supérieure à 60 pour cent, avec un minimum de 29 pour cent en moyenne Guinée (Labé) et un maximum de 98 pour cent en basse Guinée (Conakry). L’évapotranspiration moyenne annuelle va de 1 500 mm à 2500 mm. Les précipitations et les températures sont influencées par deux vents dominants, l’Harmattan, vent sec venant du nord qui souffle de décembre à février et de la mousson, vent chargé d’humidité venant de l’Océan Atlantique. Les variables climatiques influençant la production agricole sont nombreuses : pluviométrie moyenne, nombre de jours de pluies, nombre de jours de sécheresse, nombre de jours de gel, températures extrêmes, cumul de températures, etc. Leur influence dépend des besoins de chaque culture et des sols. Ainsi les besoins climatiques des céréales (Mais, Sorgho, Riz) ne sont pas les mêmes que ceux des tubercules (Manioc, Igname) ou des plantes pérennes (Palmier à huile, Anacardier).

Néanmoins, lorsque l’on ne vise pas une plante particulière un indicateur synthétique permet d’approcher les conditions générales climatiques favorables à la croissance des cultures et à leur production : la longueur de la période de croissance (LPC). Elle se définit comme la période de l’année où sont réunies les conditions de température et d’humidité adéquates pour la production agricole. La FAO la définit comme la période de l’année durant laquelle dominent les températures permettant la croissance des plantes (T moyenne >= 5°C) et durant laquelle la somme précipitation + humidité emmagasinée dans le sol dépasse la moitié de l’évapotranspiration potentielle (ETP) (FAO, 1997). Dans la présente étude, nous l’avons définie comme le nombre de mois où la température moyenne mensuelle (TMOYm) est >= 5 °C, et où le bilan hydrique mensuel (BHm) est positif. Ce dernier se calcule mois après mois en tenant compte de la Réserve Hydrique du sol (RHm), de la pluviométrie mensuelle (Pm) et de l’évapotranspiration potentielle (ETPm).

           BHm = (Pm – ETPm) + RHm

Avec : 

         • Pm : précipitations cumulées du mois en mm ;

         • ETPm : évapotranspiration cumulée du mois en mm ;

         • RHm : réserve hydrique du sol en début de mois en mm.

période de croissance

Occupation des sols

La cartographie de l’occupation des sols de Guinée a été réalisée à 3 dates dites “pivot” : 2005, 2015 et 2020.

La production des cartes de référence des trois pivots est issue d’une classification semi-automatique supervisée d’images satellites à haute résolution spatiale. Pour le pivot 2015 une couverture d’images SPOT 6/7 2015 ±1an, à 6 m de résolution spatiale et ortho-rectifiée sur l’ensemble du territoire Guinéen a été utilisée (données issues du projet OSFACO 2019) ; Pour 2005, une couverture d’images SPOT4/5 de l’année 2005±1 an mise à disposition par le programme Spot World Heritage (SWH) du CNES a pu être exploitée ; et pour 2020 le projet s’est appuyé sur des images Sentinel-2 de 2020-2021.

La classification semi-automatique supervisée est une approche consistant à définir au préalable des zones d’entrainement, qui servent de base d’apprentissage pour un algorithme de classification. Dans le cas présent l’algorithme Random Forest » a été utilisé. L’établissement des parcelles d’entrainement nécessite dans un premier temps d’identifier les différents paysages dominants à l’intérieur desquels les opérateurs déterminent des régions d’intérêt correspondant à des classes d’occupation du sol prédéterminées.

La nomenclature de l’occupation des sols utilisée est une classification hiérarchique en 47 postes et 3 niveaux d’agrégation selon le modèle de classification européen Corine Land Cover (Heymann & al, 1994) adapté aux spécificités des paysages du territoire guinéen en suivant les expériences d’adaptation précédentes en Afrique de l’Ouest (Jaffrain, 2016). Elle décrit les formations végétales conventionnelles retrouvées sur le continent Africain, définies dans la nomenclature de Yangambi (Aubreville. A, 1957) ; les grands types de cultures spécifiques à la Guinée (cultures de bas-fond, cultures de plaine de mangroves, cultures de plaine d’eau douce, …) ; ainsi que les différents types de territoires artificialisés (mines, urbanisations, etc..).

Les zones d’entrainement ont été choisies dans une dizaine de zones pilotes représentatives de la diversité des paysages sur la base des images satellites SPOT6/7 de 2015. Le résultat de ce long processus de production cartographique semi-automatique est la constitution de trois Bases de Données cartographiques de l’occupation des sols, sous des formes vectorielles (polygones) et matricielles (cellules) décrivant finement l’occupation des sols à trois dates différentes dans une nomenclature unique permettant des comparaisons et des calculs de dynamiques d’évolution sur une période de 15 ans : 2005 – 2020. Le niveau représenté dans l’atlas est le niveau 2. Ce niveau est issu d’un regroupement en 13 classes des 47 classes photo-interprétées.

Les changements de l’occupation des sols entre 2005 et 2020

Globalement les activités humaines et notamment les extensions urbaines, minières, et agricoles se sont considérablement accrues ces 5 dernières années.

La vitesse de l’expansion urbaine a doublé, passant de 1% par an entre 2005 et 2015 à 2% par an de 2015 à 2020. Les surfaces des carrières, des extractions minières et des autres chantiers ont doublé en 5 ans principalement dans les régions de Guinée Maritime et Haute Guinée. Avec des surfaces estimées à 10 000 ha dans les années 2005 et à 13 000 ha en 2015, ces dernières dépassent aujourd’hui 25 000 ha. L’expansion agricole avoisine 1 Million d’ha entre 2005 et 2020. Cette extension a tendance à augmenter dans deux régions naturelles, la Haute Guinée et la Guinée Forestière, alors qu’elle aurait tendance à ralentir dans les deux autres régions naturelles, la Guinée Maritime et la Moyenne Guinée. Les surfaces agricoles se sont étendues d’environ 20% en 15 ans avec une nette accélération ces 5 dernières années. 

Même si la forêt ne peut pas par endroit s’étendre, en particulier dans les zones protégées, les extensions agricoles, urbaines et minières ont pour conséquence une grande pression et dégradation sur les formations arborées et arbustives avec respectivement une perte de 3% des forêts denses et claires en 15 ans et de près de 5% des savanes arborées. Les zones humides intérieures et autres bas-fonds naturels et semi-naturels voient leurs surfaces se réduire de 18% en 15 ans, probablement à cause des extensions agricoles. Enfin les mangroves subissent toujours une pression mais qui semble faiblir ces 5 dernières années avec une perte de 1.8% de leur surface entre 2005 et 2015 et une perte de 0.6% de leur surface entre 2015 et 2020/2021.

Changement 2005-2020

Zonage agro-écologique et vocation agricole des terres

Le zonage agro-écologique des terres est classifié en reprenant les recommandations de la FAO (1983) :

      • Classe S1(aptitude élevée) : terres n’ayant pas de limitation sérieuse, ou seulement des limitations mineures qui ne peuvent réduire sensiblement la productivité. Le rendement attendu y est supérieur à 60% du rendement potentiel atteignable sans irrigation.

     • Classe S2 (aptitude moyenne) : terres présentant un ensemble de limitations moyennement sérieuses qui réduisent la productivité et augmentent les inputs nécessaires. Le rendement attendu y est supérieur à 40% du rendement potentiel atteignable sans irrigation.

     • Classe S3 (aptitude marginale) : terres présentant un ensemble de limitations sérieuses qui réduisent la productivité de telle sorte que la dépense ne se justifierait plus que marginalement. Le rendement attendu y est supérieur à 20% du rendement potentiel atteignable sans irrigation.

      • Classe N1 (inaptitude actuelle) : terres ayant des limitations qui sont surmontables avec le temps, mais qu’on ne peut pas corriger en l’état actuel des connaissances à un prix acceptable.

        • Classe N2 (inaptitude permanente) : terres ayant des limitations physiques telles qu’elles interdisent définitivement toute possibilité de réussite de telle ou telle utilisation.

Ce classement est obtenu par combinaison spatiale de l’ensemble des facteurs climatiques et morpho-pédologiques retenus : longueur de la période de croissance, type de sol et pente. Chaque facteur a été reclassé à dires d’experts en 5 classes d’aptitudes ; puis les facteurs ont été combinés dans un SIG et la carte finale a été obtenue en ne retenant que l’aptitude la plus faible selon le principe du facteur limitant (Liebig 1840).


La vocation agricole des terres correspond au croisement de leur aptitude agronomique avec leur disponibilité pour un usage agricole. En l’absence d’un plan national d’aménagement du territoire, la disponibilité a été estimée à partir de :

      1. la cartographie de l’occupation des sols 2020 ;

      2. la cartographie des aires protégées de l’UICN.

L’occupation des sols a été retraduite par l’ANASA en usages actuels et potentiels : urbain et infrastructure, agriculture (y.c. élevage et pisciculture), mines et forêt. Les aires protégées (parcs nationaux et forêts classées) ont défini des usages de conservation. Seules les terres à usage potentiel agricole sont considérées comme disponibles et à vocation agricole..

ZONAGE AGRO-écologique
VOCATION AGRICOLE

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