Cartographie du zonage agro-écologique
et de la vocation agricole des terres

Le Zonage AgroÉcologique (ZAE) définit des zones homogènes sur base de l’interaction des caractéristiques de sols, de la géomorphologie et du climat. Il repose sur une analyse multicritère de l’aptitude des terres à l’agriculture et à la production végétale. Il permet d’estimer la vocation agricole des terres lorsqu’il est combiné à une information sur leur usage actuel ou futur. 

Ø Le zonage agro-écologique définit des zones homogènes en termes de relief, de climat et de sols, et donc au final en termes de potentiel de production agricole. Il repose sur une analyse multicritère de l’aptitude des terres à la production Agricole. Selon la FAO (1976), l’aptitude agronomique d’une terre correspond à « l’aptitude d’un type de terre donné à un type d’utilisation donné, dans son état actuel ou après l’apport de certaines améliorations ». En l’absence d’’aménagements majeurs (irrigation, terrassements, drainage, etc.) l’aptitude agronomique d’une terre repose essentiellement sur le climat, la géomorphologie et sur les caractéristiques intrinsèques des sols (pédologie). La combinaison de ces paramètres permet de classer les terres selon des niveaux d’aptitudes agronomiques allant d’inapte à très apte. L’aptitude agronomique des terres est classifiée en reprenant les recommandations de la FAO (1983) :

Ø La vocation agricole des terres

dépend d’une part de leur aptitude agronomique et d’autre part des usages actuels ou futurs qui leurs sont réservés. Elle dépend en particulier de l’occupation des sols actuelle et des zonages existants définissant les espaces réservés à d’autres usages que l’agriculture : aires protégées, forêts classées, périmètres miniers, extensions urbaines, etc.

Classes d'aptitudes

2. Cartographie du zonage agro-écologique (aptitude agronomique des terres)

2.1. Aptitude des terres selon le climat

Dans de nombreuses régions tropicales, les conditions sont trop sèches durant une partie de l’année pour permettre la croissance des plantes sans irrigation, tandis que sous un climat tempéré, la production des cultures est limitée par les basses températures hivernales. Le calcul de la période de croissance permet de définir la période de l’année où sont réunies les conditions de température et d’humidité adéquates pour la production agricole. La période de croissance constitue un cadre de définitions des variables climatiques pour ensuite les confronter aux besoins et aux probables réponses des plantes. Ce concept est essentiel aux ZAE ; c’est un moyen d’inclure la périodicité saisonnière dans l’évaluation des ressources en terres. La longueur de la période de croissance (LPC) est un paramètre synthétique qui prend en compte les périodes de sécheresse, les mois froids, l’évapotranspiration, etc. Celle-ci débute après la saison des pluies où généralement les sols sont saturés en eau.

2.1.1 Modèle LPC

La Longueur de la Période de Croissance (LPC) correspond au nombre de mois où la température moyenne mensuelle (Tmoy-m) est > 5 °C, et où le bilan hydrique mensuel (Bhm) est > 0. Les données utilisées pour le calcul du bilan hydrique mensuel (Bhm) sont issues de la base Worldclim Version-2 [2]. Il est donné par :

             Bhm = (Pm – Etpm) + Rhm

Avec :  Pm: précipitations cumulées du mois en mm

             Etpm: évapotranspiration cumulée du mois en mm

             Rhm: réserve hydrique du sol en début de mois en mm

La réserve hydrique de chaque mois (Rhm) est fonction du Bilan hydrique mensuel (Bhm) du mois précédent. Son mode de calcul suit la logique ci-dessous :

                           Con [Bhm-1 > 0, Rhm = BHm-1]

                           Con [Bhm-1 ≤ 0, Rhm = 0)]

Le Bilan hydrique mensuel (Bhm) est calculé mois après mois. Son point de départ est relatif à une situation de sol saturé en eau, généralement après la saison des pluies. Dans ce cas, la Rhm = Ru (Réserve utile du sol). Cette dernière, dépend de la profondeur et du type de sol. Pour chaque type de sols sera estimée une « Ru » selon la notice fournie par Boulvert (1983) et des données de l’ISRIC. Dans le cas de la République de Guinée, le point de départ pour le calcul du bilan hydrique mensuel (Bhm), de celui de la Réserve hydrique mensuelle (Rhm) et enfin de la Période de Croissance mensuelle (PCm) est fixé au mois d’octobre (dixième mois de l’année).

2.1.2 Calcul de la réserve utile (Ru)

La Réserve utile en eau d’un sol (Ru) correspond à la quantité d’eau que le sol peut absorber et restituer à la plante. Cette donnée a été calculée selon les types de sols fournis par la notice morphopédologique de Boulvert (1983) ainsi que les données de l’ISRIC [3]. Pour chaque type de sol, une valeur moyenne de Ru a été calculée.

2.1.3 Algorithme de calcul de la LPC

*/ Initialisation Rh Octobre à Ru (période ou le sol est saturé en eau)

*/ Initialisation du nombre de mois de croissance à 0 (PC = 0)

*/ Pour chaque mois (ex : de Novembre à Octobre) :

             Rhm = Rhm-1

             Bhm = (Pm – Etpm) + Rhm

                           Con [Bhm >0, Rhm = min (Ru, Bhm)]

                           Con [Bhm ≤0, Rhm = max (0, Bhm)]

                                         Con [Bhm > 0, PC = 1]

                                         Con [Bhm ≤ 0, PC = 0]

              LPC tot= ∑ 1 à 12 (PC)

2.1.4 Classification retenue de la LPC

La classification retenue est la suivante :

  • S1 : aptitude élevée (période de croissance entre 6 mois et 12 mois)
  • S2 : aptitude moyenne (période de croissance de 5 mois) ;  
  • S3 : aptitude marginale (période de croissance de 4 mois) ;
  • N1 : inaptitude actuelle (période de croissance entre 2 mois et 3 mois) ; 
  • N2 : inaptitude permanente (période de croissance entre 0 et 1 mois).

2.2. Aptitude des terres selon les types de sols

Dans la présente étude l’aptitude des sols à la production végétale a été définie à dires d’experts avec l’aide du Service National des Sols de Guinée (SENASOL). Elle a été cartographiée par réinterprétation de la carte morphopédologique de la Guinée établie à l’échelle 1/500 000 par Y. Boulvert (2003). La classification retenue est la suivante :

  • S1 : Sols de bonne valeur agricole;
  • S2 : Sols de valeur moyenne ;
  • S3 : Sols de valeur marginale ;
  • N1: Sols sans valeur actuelle ;
  • N2 : Sols définitivement sans valeur agricole

2.3. Aptitude des terres selon la topographie

La morphologie (topographie) définit l’aptitude d’une terre à l’agriculture en fonction de sa position dans le modèle numérique de terrain : sommet, bas fond, piémont, etc. et de sa pente. Dans le cas présent, seul le facteur pente a été traduit en classes d’aptitudes agronomiques du fait que la classification des sols de Boulvert prend déjà en compte le critère morphologie. La classification des pentes été réalisée à partir du SRTM [5] au pas de 30m, par la fonction « Slope » d’ArcGIS. La classification retenue est la suivante :

  • S1 : 0% – 8% (Culture mécanisée sans contrainte majeure) ;
  • S2 : 8% – 16% (Culture mécanisée pouvant nécessiter des engins spéciaux) ;
  • S3 : 15% – 30% (Culture manuelle) ;
  • N2 : 30% à 60% (Culture manuelle après aménagements limitant l’érosion) ;
  • N1 : = > 60% (Limitant toute culture pour risques d’érosion).

2.4. Méthodologie opérationnelle de cartographie du zonage agroécologique (aptitude agronomique des sols)

Chaque couche de base est rastérisée (morphopédologie) ou rééchantillonnée (pente, période de croissance) au pas de 100m. Par la suite, chaque raster est reclassifié en classes d’aptitudes de 1 à 5. Enfin, une couche finale d’aptitudes pédoclimatiques est obtenue en ne conservant que l’aptitude la plus limitante pour chaque maille selon la loi du minimum de Liebig.

3. Cartographie de la vocation des terres

La carte relative à la vocation agricole des terres représente les terres aptes à l’agriculture et disponibles pour une production agricole. Les terres disponibles sont entendues ici comme les terres où de futurs producteurs peuvent disposer d’un droit d’accès et d’utilisation à des fins agricoles, et qui ne sont pas réservées à d’autres usages. Les droits d’accès et d’utilisation tout comme les usages réservés sont en général définis au travers des différents zonages réglementaires maillant le territoire : plans d’urbanisme, zonage forestier, zonage minier, projets d’infrastructures, etc. Ces zonages définissent des vocations d’utilisation.

En l’absence d’un plan national d’aménagement du territoire, ces vocations ont été cartographiées à partir de la cartographie de l’occupation des sols 2020 et celle des aires protégées de l’UICN 2020.

  • A partir de l’occupation des sols, les territoires artificialisés (villes, infrastructures), les mines, les forêts denses (yc galeries), les mangroves et les forêts marécageuses ont été considérés comme non disponibles pour une production agricole
  • Parmi les aires protégées, les forêts classées et les parcs nationaux ont été considérés comme non disponibles pour une production agricole

Les terres non disponibles ont été considérées sans vocation agricole

3.1. Méthodologie opérationnelle

La couche d’OCS 2020 est rastérisée au pas de 100m. Puis elle est reclassifiée en fonction des vocations définies à dires d’expert (ANASA, CIrad). Les forêts classées et les parcs naturels sont extraits de la couche des aires protégées de l’UICN (2020), puis également rastérisés. Ces couches sont ensuite assemblées pour former une couche de type masque : 0 = sans vocation agricole / 1 = avec vocation agricole.

Le masque est ensuite appliqué à la couche des aptitudes agronomiques pour former la couche des vocations agricoles.

  • S1 : terre à vocation élevée
  • S2 : Terre à vocation moyenne ;  
  • S3 : Terre à vocation margnale ;
  • N1 : inaptitude actuelle (période de croissance entre 2 mois et 3 mois) ; 
  • N2 : inaptitude permanente (période de croissance entre 0 et 1 mois).